L’organisation israélienne des médecins pour les droits humains (PHR-Israel) a reçu un appel du village de Salem au sujet d’un épouvantable incident concernant une naissance et une mort au point de contrôle proche de Beit Furiq. PHR-Israel a rencontré le père et la mère qui ont perdu leur enfant, parlé avec le conducteur de l’ambulance et le personnel médical de l’hôpital de Rafidya à Naplouse et aidé à dévoiler les informations relatives à cet événement. PHR-Israel a déposé une plainte officielle auprès du juge avocat général (JAG) de l’armée israélienne en exigeant une enquête approfondie et la poursuite des personnes responsables de l’extrême violation des droits humains détaillée ci-dessous. Des exemplaires de cette lettre ont été envoyées à l’Association médicale israélienne (IMA).
PHR-Israel a pris contact avec Gideon Levi, du journal Haaretz, au sujet de cet incident. Vous trouverez ci-dessous des extraits de l’article de Levi. Le texte intégral de l’article est annexé en pièce jointe.
Il y a deux semaines, un jeudi, Rula a réveillé Daoud ; il était près de cinq heures du matin et elle lui a dit que les contractions avaient commencé. "Je sens que je vais accoucher", lui a-t-elle dit avec l’expérience de ses accouchements précédents. Il manquait deux jours pour que se termine son huitième mois de grossesse. Ils ont attrapé le sac préparé en avance et ont pris le chemin de l’hôpital de Rafidiya, à Naplouse. En temps normal, ce voyage ne prend pas plus de quinze minutes. Daoud a téléphoné au Croissant Rouge de Naplouse, demandant qu’on leur envoie immédiatement une ambulance. On lui a dit que l’ambulance ne pouvait pas entrer dans le village à cause des forces armées israéliennes, mais que le véhicule les attendrait au point de contrôle de Beit Furik, à cinq minutes de chez eux, pour les conduire à l’hôpital...
[Au checkpoint] il y avait sept ou huit soldats et deux jeeps, ils avaient à manger et du thé ou du café. Ils étaient debout et bavardaient et nous ignoraient, à l’exception de l’un d’entre eux…
Environ quinze mètres séparaient le soldat de la femme, Daoud se trouvant entre eux. « Son arme était dégainée, il me menaçait : Fais-la venir.' Et j'essayais de le convaincre qu'elle était en train d'accoucher. Elle avait peur du soldat au fusil. Elle a crié :
Je suis en train d’accoucher, je suis en train d’accoucher’. Je lui ai dit : Maintenant ils vont me tuer.' Elle a arrêté de crier. Elle avait déjà mis l'enfant au monde, derrière le rocher. Elle est restée silencieuse quelques minutes puis elle a recommencé à crier :
L’enfant est morte, l’enfant est morte !’
J’ai couru vers les voitures, j’ai fait environ 300 mètres. Je n’ai même pas regardé en arrière. Et puis j’ai fait venir une voiture à 20 mètres du portail jaune du point de contrôle. Je me sentais mal à l’aise de la leur laisser voir dans cet état, même le chauffeur de taxi. J’ai éclaté en sanglots et elle a pleuré aussi. Le cordon ombilical gisait sur le sol, entre le bébé et la mère. La petite fille était dans ses bras, couverte de sang. Même l’écharpe de Rula était pleine de sang, tout était couvert de sang. Et le cordon ombilical était plein de sable et de poussière.
"Je lui ai demandé : Qu'est-ce- que c'est que ça? Que devons-nous faire?' et elle a dit :
Notre petite fille est morte. Elle est sortie, elle a bougé un peu puis elle est morte.’ Alors j’ai vu le sang qui sortait de son nez et de sa bouche. L’enfant semblait morte. "
Le chauffeur [de l’ambulance du Croissant rouge], Khaled Khalili, a déclaré à l’enquêteur de Médecins pour les droits humains-Israël, Ibrahim Habib, que la famille avait appelé l’ambulance à 6h15 du matin et qu’ils avaient demandé plus de temps pour s’organiser. À 6h40, ils avaient rappelé en indiquant qu’ils se rendaient au point de contrôle. Khalili a déclaré que sur le chemin du checkpoint, près du camp de réfugiés de Balata, à un endroit nommé Ein Yaakov, des soldats l’avaient soudain arrêté à un autre point de contrôle, lui ordonnant de faire demi-tour. Il a alors dû chercher un autre itinéraire, ce qui lui a pris 10 minutes de plus. Lorsqu’il est arrivé au checkpoint de Beit Furik, vers 7 heures du matin, la femme n’y était plus.
Il dit que les soldats lui ont indiqué qu’un véhicule de tourisme était venu la chercher.